Grochowski et l’art magique du rallye

Grochowski et l’art magique du rallye

05/18/2018

Texte de Dean Campbell, photos de Dean Campbell, Kristofer Schofield, Philippe Erickson et Andrew Harvey

En 2008, Eric Grochowski et Leanne Junnila ont remorqué leur voiture de rallye à 2RM de Calgary au Rallye Baie des Chaleurs en Gaspésie, sans avoir l’argent pour payer le carburant du retour. Ils espéraient payer leur retour avec l’argent que le rallye offrait pour les victoires en spéciales. Ils se disaient qu’en roulant vite, ils auraient assez d’argent pour retourner chez eux.

« Ce n’est pas ce que je recommanderais à ceux qui commencent en rallye aujourd’hui », avoue Grochowski. « Mais les petites décisions font les grandes aventures. Si on n’avait pas fait ce rallye, on n’aurait pas remporté le championnat. Leanne n’aurait pas été reconnue ni choisie pour copiloter Pat Richard, puis Verena Mei, et maintenant Dave Wallingford, ni couru au WRC. »

Ce périple, en 2008, était aussi une grande aventure qui découlait d’autres petites décisions.

 
 

Grochowski a commencé en rallye en 2002 ou 2003–il ne se rappelle plus trop. Il a d’abord copiloté dans trois rallyes de performance. À partir de là, Grochowski s’est intéressé aux rallyes de navigation puis est revenu aux rallyes de performance. Jumelé à Leanne Junnila, l’équipage a enflammé la classe 2RM partout au Canada pendant quelques années avant de se retirer du championnat national à titre d’équipe.

Junnila s’est mise à copiloter Pat Richard chez Subaru Rally Team Canada avant de rejoindre Verena Mei au début du programme Fiesta. Pendant ce temps, Grochowski a pris toutes sortes de boulots–mécanicien de service, organisateur de rallyes de navigation et de rallyes régionaux de performance−et à l’occasion, pilote, pour se garder alerte derrière un volant, essayant la propulsion avant de construire une Subaru Production qu’il a pilotée pendant quelques saisons.

« J’ai vite compris que si les fans de rallye ne travaillaient pas tous ensemble, rien de tout ceci ne serait possible », a philosophé Grochowski. « C’est frustrant de voir l’idée que certains compétiteurs se font du rallye. Les compétiteurs ne sont pas des clients et le rallye n’est pas un commerce. »

« C’est une communauté, et quand on travaille tous ensemble, on obtient les meilleurs résultats pour tout le monde. Ça n’a rien à voir avec le choix d’un camp. En rallye, il n’y a pas de camp. »

 
 

Grochowski a déjà 15 ans d’ancienneté en rallye et il a occupé plusieurs postes différents, ce qui, dit-il, l’a aidé à mieux comprendre le sport. Ses émules sont Terry Epp, Pat Richard et Keith Morison, des gens qui ont une approche holistique du sport, conçue dans une vision profonde et une expérience immense.

« J’avais déjà entendu Pat Richard parler de l’art magique du rallye », s’est souvenu Grochowski. C’est ce qui permet aux copilotes et pilotes d’expérience de s’asseoir dans l’autre siège et de faire mieux que les autres compétiteurs débutants. Plus vous faites de choses en rallye, plus vous développez cet art du rallye. »

Grochowski a même vu cette expertise se développer chez des spectateurs qui, le long du chemin, assistent aux rallyes année après année, et qui apprennent à discerner les nuances entre les diverses façons de foncer sur la route. Ils arrivent à percevoir qui a raison de foncer et qui ne devrait pas. Ainsi, c’est facile de comprendre pourquoi les spectateurs de longue date et les travailleurs bénévoles réussissent si bien quand ils tentent leur chance en rallye. Il croit fermement qu’un assortiment d’habiletés générales améliore aussi chaque petite habileté fine.

Cet hiver, Grochowski et Junnila ont vendu leur Subaru de rallye plutôt que d’investir dans de coûteuses améliorations. Ce sont des nouveaux venus qui l’ont achetée et Junnila s’est reconvertie en copilote professionnelle. Grochowski a consacré son nouveau temps disponible à travailler comme équipier de service pour l’équipe de Leanne, mais il a encore eu plus de temps disponible lorsque Wallingford a dû abandonner après une sortie de route au Rally Mexico, en mars dernier.

 
 

Dans une semaine, Grochowski va s’installer dans le baquet de droite pour la première fois depuis longtemps, faisant équipe avec Chris Braun  dans une Subaru Production. Le duo ne cherche pas à faire un podium, il n’y a donc pas de pression, alors le plaisir sera immense. C’est seulement la cinquième fois qu’il s’assied à droite, il sait que les défis seront nombreux.

« Je sais que je fais du rallye depuis longtemps, mais j’ai encore l’impression parfois d’être un débutant, ce qui peut être drôle », signale Grochowski. « On peut toujours apprendre quelque chose surtout quand tu observes des gars comme John Buffum ou Taisto Heinonen. »

À titre de copilote, Grochowski aura des responsabilités d’un tout autre ordre et ses compétences comme copilote sont loin d’être complètes. Mais il sait qu’il ne doit pas inscrire un «  +  » dans ses notes au lieu de « et ».

« Les gens me demandent si je vais aussi coacher Chris dans la voiture », confesse Grochowski. « C’est impossible. Ce sera la première fois que je copilote aux notes, je serai bien trop occupé à faire juste mon boulot. »

Quelque part derrière, la vieille Subaru de Grochowski parcourra les mêmes spéciales, aux mains de ses nouveaux propriétaires, Clint Cook et Lauren Fry. Grochowski croit que c’est la voiture idéale pour commencer, et il aime l’idée d’aider les autres à commencer en rallye, la voiture étant peut-être la flamme qui allume une nouvelle passion pour le rallye chez les autres. C’est difficile d’imaginer la communauté canadienne de rallye sans le grain de sel de Grochowski, et il est du même avis.

« Je me suis fait tellement d’amis et il y a tellement de choses que je dois au rallye dans ma vie, que je ne me vois pas couper les ponts. »

Se remémorant cette traversée risquée du Canada pour participer au Rallye Baie-des-Chaleurs, Grochowski remet l’enjeu en perspective.

« Nous n’avions pas d’équipe de service, rien du tout. Il fallait juste que ça marche et nous avons fini par gagner 400-500 $, ce qui était tout juste ce qu’il nous fallait pour rentrer chez nous », raconte encore Grochowski. « Ce n’est la façon la plus intelligente de faire du rallye, mais c’est certainement inoubliable. »

Suivez le Rocky Mountain Rally les 26 et 27 mai ici et sur les pages officielles FacebookInstagram, et Twitter du Championnat canadien de rallye.

 

Subjets Connexes

Mailloux/Poirier triomphent dans des...
Le Rocky Mountain Rally, qui s'est tenu le week-end dernier près d'Invermere, en...
L’Estage revient au Perce-Neige...
Avec un tableau rempli d’anciens champions nationaux, d’as internationaux et de compétiteurs de haut niveau,...
Une “Suburarri” qui déchire...
La dernière manche du Championnat canadien de rallye s’est tenue à l’endroit habituel, Big White...
Mailloux glisse vers la...
Reconnue comme la journée de rallye la plus difficile au Canada, le Lincoln Electric Rally...